samedi 24 mars 2018

Communication 1.3 : Interférences : L'ENCODAGE



COMMUNICATION 1.3 :  L'ENCODAGE


Dans les premier et le deuxième articles de cette série sur les interférences de la communication, nous avons survolés certains aspects pouvant nuire à son efficacité, mais rien de ce qui fut mentionné jusqu’à présent n’a autant d’influence que l’ENCODAGE. C’est sur cet aspect que dépend en grande partie notre efficacité à communiquer. Son importance n’est donc pas à négliger.

Voyons un peu pourquoi.

Nous retrouvons dans l’étymologie du mot encodage la racine « code ». Au niveau de la communication, un code est « un système de symboles destiné à représenter et à transmettre une information. » (Petit Robert). Dans le cas qui nous intéresse ici, ce système est représenté par l’alphabet et les règles grammaticales auxquelles une langue est assujettie. Le choix, la séquence des mots et la suite logique du discours feront en sorte que le message sera bien compris.

Donc, lorsque l’on parle d’encodage, on fait directement référence au contenu même du message ; aux termes, aux mots, que nous choisissons afin d’obtenir le maximum d’impact sur la compréhension de notre interlocuteur. En théorie, cela peut paraître bien simple. Un mot en vaut bien un autre, non ?
 
Oui…et non.

Combien de fois peut-on se rendre compte que l’interlocuteur auquel on s’adresse comprend autre chose, ou ne saisit pas tout à fait l’intensité, la nuance ou la portée des paroles qu’on lui adresse ? Que se passe-t-il?

La réponse est simple : Nous n’avons tout bonnement pas choisi les « bons » termes. Ou nous ne connaissons pas suffisamment la langue pour en discerner les connotations et/ou nuances. Également, il se peut que nous n’ayons pas pris en considération notre auditoire.(Lire Une bonne formation, c'est possible ? 2ème partie)

Que faire à ce moment-ci ? Doit-on se mettre à lire les grands ouvrages de la littérature ? Augmenter et diversifier notre vocabulaire ? Se familiariser avec tous les jargons possibles pouvant être reliés à un domaine spécifique ou à un autre ?  Évidemment que … non.  Quoique, d’un autre côté, une connaissance solide du langage dans lequel on transmet une information est un atout majeur et représente un travail constant. Mais cela peut prendre beaucoup de temps, voire des années, afin d’élever notre langage au niveau désiré.

Plus rapidement, que peut-on faire dans ce cas ?

On peut simplement prendre quelques instants pour bien réfléchir au message que l’on veut transmettre. En partant, la SIMPLICITÉ est toujours de mise. Elle est également synonyme de CLARTÉ.

Qu’entend-on par simplicité ? Le choix des mots, bien sûr. Des mots qui frappent l’imaginaire, qui sont directs, qui vont droit au but. Mais attention ! C’est ici que réside une vaste partie du problème à communiquer efficacement. Les mots que nous choisissons sont « teintés » et parfois portent à confusion.

La langue est en fait une traître maîtresse car nous pensons la posséder mais c’est elle en fait qui nous possède. Le poète Arthur Rimbaud (1854-1891) a merveilleusement décrit cette ambiguïté dans sa célèbre phrase : « Je est un autre. » Ce qu’il veut dire ici est que le choix des mots que nous faisons est basé sur nos propres perceptions des choses et qui ont elles-mêmes aidé à façonner notre expérience de vie. En d’autres termes, un mot peut ne pas avoir exactement la même signification chez une personne ou une autre, à moins que les expériences de vie soient similaires, et encore ! De plus, lorsque nous décrivons une situation, nous avons tendance à la modifier, ne serait-ce qu'en y ajoutant des adjectifs, donc on apporte une nuance, une vision biaisée de la réalité, et ce, bien malgré nous.

Prenons un exemple pour illustrer ce fait :

Fluette raconte sa promenade à son ami : 

"La marche n'était pas agréable. il ventait à écorner les bœufs ! J'avais toutes les difficultés du monde à avancer!"
D'après ses dires, on pourrait croire que Fluette est parti marcher dans un début de tornade ou d'ouragan. Alors que dans la réalité, lorsque Fluette est parti prendre sa marche, il y a eu des bourrasques de vents de l'ordre de trente kilomètres/heure. Lorsqu'il raconte son histoire, il la "teinte", lui donne une autre proportion, au point où il déforme la réalité.


Par conséquent, lorsque nous encodons un message, il est toujours prudent d'éviter les allégories, les hyperboles (exagérations), bref les figures de style, et tout ce qui risque d'embrouiller la clarté de notre message.



Par exemple, il serait plus efficace de dire :

« Il est interdit de toucher à ceci sous peine de renvoi. »

Que

« Nous aimerions que vous évitiez de toucher à ceci. Cela pourrait épargner à tous de désagréables conséquences. »

Même si le deuxième message a l’avantage d’être beaucoup plus « politiquement correct », sa netteté donc son efficacité, est quelque peu entachée. En effet, lorsqu’on « souhaite éviter » quelque chose, l’impact n’est pas aussi fort que de l’« interdire ». En fait, « souhaiter éviter » peut vouloir dire que je peux tout de même le faire, ne serait-ce que par accident.

Tandis que dans le premier cas, il est clair que je ferai tout en mon pouvoir afin de me tenir loin de cet objet, allant même jusqu’à vouloir prévenir tout accident. En plus de ceci, dans cet exemple, le message est bref, donc les possibilités d’interprétation sont limitées.

Plus vous pouvez formuler correctement votre pensée de façon concise et précise, plus il sera facile à votre auditoire, votre interlocuteur, de comprendre exactement la teneur de vos propos.

Prenons un autre exemple :

Crevette écrit à sa collègue Langoustine :

« Bonjour,

Je suis désolée pour le retard concernant ma réponse pour le dossier de M. Crabe. Je suis présentement submergée de travail et j’ai peine à me maintenir la tête hors de l’eau. Je te reviens là-dessus probablement d’ici la fin de la semaine. J’espère que ta journée se déroulera mieux que la mienne. »

Observons un peu le choix des mots de ce message et tentons d’en dégager une impression générale.

Désolée : Dès le départ, Crevette se met en position d’infériorité (on est désolé, on s’excuse, car on a l’impression de ne pas avoir fait une chose ou simplement de ne pas avoir été « correct »)

Retard : Le terme en dit long. Crevette manque d’organisation ou elle n’est pas en mesure de respecter ses échéanciers.

Submergée : Le terme est fort. Il indique qu’il y a une perte partielle ou totale de contrôle sur les tâches quotidiennes.

J’ ai peine à me maintenir la tête hors de l’eau: En effet, pauvre Crevette … Elle semble dépassée et met beaucoup d’énergies dans ses tâches.

Probablement : Crevette créé un doute car ce n’est certainement pas une certitude. Il n’y a donc rien d’affirmatif. Elle vient également d’annuler toute efficacité/utilité de son message.

Bref, vous avez compris. L’impression générale que donne ce message est que Crevette est sur le point de « péter au frette ». Sérieusement, soit qu’elle ne sait pas s’organiser efficacement, ou soit qu’elle devrait changer de travail et avoir moins de responsabilités. Crevette est peut-être due pour des vacances. Toute personne soumise à une période de temps plus ou moins prolongée à un tel régime pave la voie à l’épuisement professionnel.

Reprenons le même exemple, et choisissons d’autres mots pour exprimer la même situation :

Bonjour Langoustine,

En réponse à ton message, je suis fortement occupée ces jours-ci mais je n’ai pas oublié le dossier de M. Crabe. Je vais te redonner des nouvelles d’ici la fin de la semaine. Bonne journée.

Essentiellement, ce message dit la même chose. Mais l’impression qu’on en retire est bien meilleure.  Pourquoi ? Simplement parce qu’on a pris le temps de bien choisir ses mots.

En réponse : C’est affirmatif. On ne part pas en « déficit » On a même l’impression que le tout était calculé, donc planifié et organisé.

Fortement occupée : Crevette a beau avoir beaucoup d’ouvrage mais on la sent en contrôle des choses.

Je n’ai pas oublié : C’est tellement rassurant. On sent le professionnalisme de Crevette, qu’elle a le sens des priorités et qu’elle est, encore une fois, bien organisée.

Je vais te redonner : C’est déjà plus certain, sinon positif, que « je te redonnerai ». En utilisant le futur proche Crevette fait sentir qu’elle sait quand elle le fera, qu’elle a planifié cette action et que l’impression générale qu’on en retire est beaucoup plus rassurante que si elle avait utilisé le futur de l’indicatif comme c’était le cas dans le premier exemple.

Même si ces exemples peuvent sembler quelque peu (si peu, en réalité) exagérés, il n’en demeure pas moins qu’ils nous font voir l’importance du choix des mots que nous utilisons. L’encodage d’un message, quel qu’il soit, est ce qu’il y a de plus important dans l’efficacité de la communication.  Si vous encodez bien vos messages, il y a fort à parier que vous dégagez une forte image professionnelle car c’est avec ce moyen que nous abordons toujours notre auditoire, que nous représentons qui nous sommes.  

Prenez quelques instants pour analyser votre encodage. Quelle image de vous-même communiquez ou projetez-vous ?  

Bientôt, l’envers de la médaille ; le décodage.
  
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Louis Carle
Directeur

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